Jacques Le Houezec : tabacologue et défenseur de la vape

Tu es le premier tabacologue français à avoir défendu la vape. Peux-tu nous raconter tes premiers pas avec la cigarette électronique ?

Les tous premiers modèles de cigarettes électroniques que j'ai vus apparaître sur le marché étaient les Ruyans, sortis en 2005. Comme beaucoup de gens j'ai d'abord été très circonspect à leur égard. Mais finalement, en 2009, j'ai décidé d’écrire une revue de presse scientifique mensuelle sur la vape, destinée aux tabacologues. En effectuant mes recherches, j’ai constaté qu’il y avait de plus en plus d'articles scientifiques consacrés à la vape (je n'aime pas le terme de cigarette électronique qui dessert la vape et qui n'est pas exacte, car il ne s’agit pas d’une cigarette). Je me suis inscrit sur plusieurs forums de vape et j’ai créé le blog : http://jlhamzer.over-blog.com/

Ma première intervention dans les médias (Europe 1 si mes souvenirs sont bons) a fait sensation chez les vapoteurs. Petit à petit, je me suis dit qu’on tenait là une vraie révolution en ce qui concerne l'arrêt du tabac. 

Enfin, en 2013, j'ai participé au premier "E-cigarette Summit" à Londres où j'ai pu rencontrer des collègues scientifiques et médecins convaincus eux aussi. C'est sur ce modèle que j'ai pu initier le premier Sommet de la vape en France, en 2016.

Santé publique France vient de nous apprendre que la cigarette électronique aurait aidé 700.000 fumeurs français à stopper leur consommation de tabac. Comment expliques-tu ce chiffre ?

Ce chiffre est très certainement sous-estimé car il n'y a pas d'études épidémiologiques sérieuses en France (ce n'est pas dans la culture de notre pays contrairement au Royaume-Uni par exemple) sur la vape et l'arrêt du tabac. C'est encore une fois une mesure faite au "doigt mouillé". Depuis plusieurs années, je me déplace dans des boutiques de vape (l’exercice de terrain est indispensable pour savoir de quoi l'on parle) et je peux attester que le taux d'arrêt tabagique grâce à la vape est impressionnant. 

Dans les enquêtes de Santé Publique France, qui ne sont que ponctuelles et qui n’offrent donc pas une vision sur le long terme, on néglige certainement les gens qui ont à la fois arrêté de fumer, mais aussi de vaper. Ce qui me rassure, c'est que le nombre de vapo-fumeurs a baissé, car le matériel mais aussi les boutiques ont fait des progrès. J'espère que dans quelques années nous aurons des données plus sérieuses qui nous permettront de tirer un bilan des effets de la vape sur l'arrêt du tabac.

La nicotine est souvent diabolisée. Tu es pourtant l’un de ses ardents défenseurs. Peux-tu nous en dire plus ?

La nicotine n'est pas plus dangereuse que la caféine mais elle a toujours été assimilée au tabac fumé. Et pour cause, depuis plus de 30 ans, on répète inlassablement aux fumeurs que le problème c'est la nicotine, alors que le vrai coupable c'est la fumée qui naît de la combustion (en fumant de la salade séchée, on obtiendrait les mêmes substances toxiques dans la fumée, goudrons, monoxyde de carbone, particules fines solides, gaz oxydant... mais pas la nicotine !). La nicotine est donc perçue comme la substance du diable. Mais ce n'est qu'un psychostimulant, tout comme la caféine par exemple. Par ailleurs, elle a des propriétés très intéressantes pour réduire les effets de bon nombre de maladies psychiatriques et neurologiques, mais trop peu de recherches lui sont accordées, encore une fois à cause de sa diabolisation

Mets-tu en garde les utilisateurs de cigarette électronique contre certains effets néfastes ? Qu’en est-il par exemple du vapotage passif ou de la vape pendant la grossesse ?

Absolument pas. Avec la vape nous sommes dans une logique de réduction des risques tabagiques (dû à la combustion). Vaper n'est pas fumer. Consommer de la nicotine sans combustion n'est pas plus un problème que de consommer du café. Pour une femme enceinte tout sera toujours mieux que de fumer.

Si une femme enceinte n'arrive pas à arrêter de fumer, malgré son envie poussée par le fait qu'elle est montrée du doigt si elle fume, alors il faut qu'elle vape. Elle va immédiatement éliminer le monoxyde de carbone qui est le pire ennemi du système cardiovasculaire et qui prend la place de l'oxygène indispensable au bien-être de son futur bébé. De même, il n'y a pas de vapotage passif, le vapoteur retenant la quasi totalité (PG/VG et nicotine) qu'il absorbe et ne rejetant principalement que de la vapeur d'eau (qui en plus se dissipe très rapidement).

Avec Amzer Glas, ton organisme de formation, tu es à l’origine des premières certifications dans le domaine de la vape. En quoi cela consiste-t-il ?

Au début je faisais des formations d'une journée ayant pour but de rassurer les professionnels de la vape quant à la non dangerosité de la nicotine (ils étaient tous fumeurs à la base et avaient donc peur de la nicotine, puisqu'on leur expliquait depuis plus de 30 ans que c'était elle la responsable). J'ai formé ainsi plus de 400 personnes en 4 ans, y compris certains professionnels de santé. 

Cette année, en partenariat avec le premier syndicat de la vape, le SIIV, nous avons mis en place une certification pour offrir une reconnaissance aux métiers de la vape. La certification se déroule sur 3 jours avec 4 formateurs : https://amzer-glas.com/ Plus de 30 personnes ont été certifiées cette année et les boutiques ayant formé la majorité de leur personnel peuvent afficher un logo "professionnel certifié".

Quels conseils donnerais-tu aujourd’hui à un fumeur qui souhaiterait arrêter définitivement la cigarette traditionnelle ?

Je pense que le fumeur doit s'adresser à une boutique de vape car les professionnels sont de mieux en mieux formés et sont à même de leur donner les conseils et le soutien dont ils ont besoin. Il est très important d'arrêter de fumer le plus vite possible en remplaçant la cigarette traditionnelle par la vape, de façon exclusive. Il faut accepter de prendre le dosage de nicotine le plus élevé possible et surtout de boire beaucoup plus... d'eau ! La vape déshydrate plus que de fumer et une bonne hydratation est indispensable pour que la vape devienne agréable.

Quel est aujourd’hui ton matériel de prédilection ? Les liquides qui t’ont particulièrement marqué ?

Pour le matériel, je privilégie une bonne batterie (type iStick TC 40W, Cube ou Aegis qui ont une autonomie suffisante) et principalement le Zénith (Innokin), un atomiseur facile à vivre et adaptable à pratiquement tous les besoins (en fonction de la résistance utilisée). Selon ma pratique de terrain en boutique, ce sont des valeurs sûres.

Quant aux liquides, eh bien je dirais que c'est à chacun de trouver son graal ! Les goûts ne sont pas les mêmes d’un vapoteur à l’autre. Pour les liquides il n'y a pas de secret, il faut aller les tester en boutique et éviter d’acheter un liquide que l'on n'a jamais goûté.

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